Voilà. Plus de quarante interviews, la couverture de chacun de ses films depuis 2003, des évolutions importantes sur le site, et il aura fallu retourner aux sources — puisque Irréversible nous a fait naître — pour enfin vous proposer une interview avec Gaspar Noé. Nous remercions chaleureusement Gaspar Noé pour sa disponibilité ainsi qu'Isabelle Sauvanon. Bonne lecture.
Si vous aviez la possibilité de refaire une séquence d'un de vos films, lequel choisiriez-vous ?
Je n’ai pas vraiment de regrets sur aucune séquence en particulier. Peut-être parce que je ne regarde jamais mes anciens films, car alors j’ai envie de tout remonter, re-étalonner, re-mixer, etc.
Après la disparition de Philippe Nahon, qui nous a personnellement profondément touchés, envisagez-vous de lui rendre hommage cinématographiquement ?
J’ai écrit une lettre d’hommage à mon ami quand il est mort, qui a été publiée dans Libération… Depuis, ses cendres ont été jetées dans la mer et ça me donne envie d’y aller nager… Le prochain hommage, ce sera quand la restauration digitale 2K/4K des deux films que j’ai faits avec lui sera accomplie et que le film pourra enfin ressortir en salles et en Blu-Ray.
Vous tournez plus régulièrement. Est-ce parce que vous avez plus d'opportunités ou simplement parce que vous avez plus conscience qu'avant du passage du temps ?
Je tourne quand on me donne de l’argent pour tourner. Enter The Void et Love étaient des projets très difficiles à financer, surtout le premier qui était vraiment cher (12M d’euros) et très atypique dans sa forme. Mais je ne voulais pas me disperser en réalisant des projets qui me tenaient moins à cœur. Aujourd’hui, que ces rêves d’ados sont accomplis, je suis plus dans une logique de savoir où il y a de l’argent pour faire un film qui m’amuse et sur lequel personne ne me prendra la tête. S’il faut le tourner en 15 jours, adjugé vendu. Envoyez l’oseille. Et s’il faut le faire en 5, pareil… Et si on m’en donne pour tourner un film sur 4 mois ou plus, comme Enter The Void, bien sûr que j’y vais. Mais la liberté accordée est toujours beaucoup plus précieuse que le budget.
Quelle œuvre - film, livre, musique... - récente vous a marqué au point de vous inspirer voire de vous ouvrir de nouvelles perspectives ?
Techniquement parlant la première demie-heure de Gravity m’a ébloui. Il y 6 mois j’étais à l’hôpital, gavé de morphine, et le film repassait en VF sur le petit poste de télé à l’autre bout de ma chambre. Et j’ai pris mon pied autant que la première fois que je l’ai vu dans la meilleure salle 3D de Paris… A part ça, j’ai profité de ma convalescence et surtout du confinement pour rattraper plein de grands films que je n’avais jamais vus : Andreï Roublev, La règle du jeu, La ballade de Narayama (celui de 1958 réalisé par Kinoshita), L’intendant Sansho et O’Haru, femme galante. C’est de découvrir de tels chefs d’œuvre qui te donnent envie de réaliser de nouveaux films…
Envisagez-vous, un jour, d'adapter une œuvre ou de vous adjoindre un scénariste ?
Oui, bien sûr. Mais je n’ai pas d’idée précise de roman à adapter ou de co-scénariste en ce moment.
Qu'est-ce qui apaise vos angoisses ?
Regarder des grands classiques du cinéma et m’endormir dessus.
Dans votre carrière, beaucoup de vos projets ont découlé de certaines idées passées : Pulpe Amère préfigurait Carne avec sa voix off omniprésente, et à l’époque de Carne vous vouliez déjà faire Enter The Void ainsi que Love, que Dario Argento a failli produire. Le projet Love en 1992 s’intitulait Danger et c’est celui-ci que vous aviez pitché à Vincent Cassel et Monica Bellucci avant de finalement reprendre au dernier moment une idée de viol et de vengeance en plan-séquence… Si vous avez reconnu avoir été inspiré par Memento, quand vous est venue l’idée de monter le film à l’envers ?
Dario Argento n’a jamais failli produire Irréversible ! Je ne sais pas d’où sort cette fausse info.
[NdR : L'information selon laquelle Dario Argento devait produire Love — et non Irréversible — provient d'un entretien accordé par Gaspar Noé à Christophe Lemaire qui lui demandait ses projets, peu après Carne et pour la revue Le Cinéphage : "Sinon, j'ai également un projet avec Dario Argento. Ayant vu Carne au Festival de Toronto, il m'a proposé de produire mon prochain film. Un drame psycho-social sexuel ! L'histoire d'une liaison entre deux paumés qui finit mal."]
Par contre il est bien venu dans ma salle de montage quand je montais le film, je lui ai montré la première moitié du film et me suis arrêté au moment où le personnage joué par Monica entre dans le tunnel. Je voulais qu’il voie le film en entier sur grand écran… A part à ça, quand j’ai vu Memento, je me suis senti totalement perdu dans sa structure temporelle très labyrinthique faite de séquences qui allaient chronologiquement à l’envers et d’autres à l’endroit. Mais la vision de ce film m’a rappelé qu’il existait un autre film que j’avais raté au cinéma et à la télé, mais qui était raconté juste à l’envers. C’était Trahisons conjugales (Betrayal) d’après une pièce de Harold Pinter. Du coup j’ai écrit une histoire de “viol et vengeance” - ratée dans ce cas - qui se déroulerait en une seule nuit et en une douzaine de séquences qu’on pourrait monter à l’envers. J’ai écrit chaque séquence sur une feuille séparée, et en inversant l’ordre une, puis deux fois, je pouvais voir si le film serait clairement compréhensible - et s’il était logique aussi - dans les deux sens. On a tourné le film de manière chronologique en un peu moins de six semaines, mais je savais que le film serait monté à l’envers dès le départ. C’était mon souhait. C’est juste 17 ans plus tard, quand on a re-masterisé le film en 2K/4K que j’ai eu le film de retour dans ma nouvelle salle de montage que je me suis dit qu’il y avait une version alternative à tenter comme bonus du Blu-Ray. Et ce nouveau montage chronologique, assez vite réalisé, s’est avéré bien plus intéressant que je ne l’avais jamais imaginé. Il a été projeté au festival de Venise et il sort enfin en salle aussi. Mais je conseille vivement à tout le monde de voir la version originale de 2002 en premier, et puis ensuite “l’inversion intégrale” de 2020. La première génère beaucoup de questions, et la deuxième y apporte les réponses, pas très reluisantes par ailleurs.
Lors de votre masterclass à Lyon, Cyril Roy [acteur dans Enter The Void] m’a raconté qu’en Asie, Irréversible avait eu droit à un DVD remonté dans le sens chronologique. Vous m’aviez ensuite confirmé en m’expliquant que ç'a été fait sans votre accord et qu’à la place, vous auriez sûrement mis des cartons noirs entre chaque scène, un peu comme dans Love. Ce n’est pas ce qu’on voit dans l’inversion intégrale, pour laquelle vous et votre équipe avez retravaillé chaque transition afin de conserver les raccords invisibles. D’où vient ce changement ?
Effectivement les Coréens s’étaient aventurés à un remontage chronologique comme bonus pour leur DVD, mais quand j’ai commencé à regarder cette version, les raccords étaient tellement mal faits que j’ai arrêté au bout de 20 minutes et ne l’ai plus jamais regardé. Dans l’inversion intégrale que j’ai montée, on a bien pris le soin que tous les raccords entre les séquences soient aussi agréables que dans la version originale.
À l’époque, en 2016 donc, StudioCanal devait ressortir le film en Allemagne avec un nouveau master. Finalement, c’est sur un Blu-Ray italien qu’on a pu voir ce master courant 2017. Y a t-il une différence entre la version 2017 et la version 2020 du montage original ?
Je crois que les Blu-Ray d’Irréversible existant dans le commerce (italien, japonais, etc.) sont tous des pures arnaques en fausse haute-définition, et faits à partir de gonflages foireux des masters basse définition qui nous servaient pour la télé et les DVD vers 2002 … Non, je n’ai absolument rien changé au montage de la version originale en faisant, en 2019, la re-masterisation du film.
[NdR : s'il existe bien des faux Blu-Ray se servant du master DVD, l'édition italienne est bien une "nouvelle restauration", visible en France sur Prime Vidéo. Le grain y étant beaucoup plus défini et l'image bien plus détaillée que la version DVD ou que le faux Blu-Ray Australien. StudioCanal nous a confirmé que la version présente sur Prime est bien une version légale. Mystère donc sur cette restauration que Gaspar Noé ne semble pas avoir approuvé. On veille à se renseigner auprès des différents distributeurs et équipes d'acquisition pour en savoir davantage]
Le délai entre ce master et la ressortie est-il dû au fait que vous aviez finalement eu l’idée de faire “l’inversion intégrale” pour les bonus Blu-Ray ? Sinon, pourquoi y a-t-il eu un délai de plusieurs années alors que le master était prêt et vraisemblablement validé ?
Le seul master validé est celui qu’on a entrepris en 2019 et qui est enfin prêt à être commercialisé en 2020. Aucun autre n’a jamais été validé. Puis c’est joli de passer de “2002” a “2020”, on a l’impression d’un retournement partiel des flèches de lecture, comme dans le nouveau remontage.
Irréversible a été re-masterisé en 4K, mais StudioCanal sortira les deux versions du film dans un combo double Blu-Ray standard. Est-ce uniquement à cause de la faible popularité du format UHD ?
La vérité est que le film d’origine était tourné en super 16mm, post-produit en vidéo HD mais pas du tout 4K et après étalonnage le tout re-shooté sur pellicule 35mm. On voyait le grain du 16 et ça faisait partie du charme de l’image. Si le film est gonflé en 4K, l’image de base est de toute façon intérieure en définition au 2K. Pour faire des Blu-Ray 4K, il faut les faire à partir de tournages en 4K ou de négatifs dont la prise de prise de vue avait été en 70mm ou 35mm. Autrement, c’est inutile. Mais si les projos des salles sont en 4K, il est normal de leur livrer un DCP au format 4K, même lorsque l’image n’a pas la définition escomptée.
Ce n’est pas un hasard si j’évoquais Pulpe Amère tout à l’heure : la première édition DVD d’Irréversible devait l’inclure dans les bonus. Or, il a beau être mentionné sur la jaquette DVD, le film en est complètement absent. Peut-on espérer le voir un jour en entier, peut-être dans les bonus du Blu-Ray ? À noter pour nos lecteurs que ce court a été photographié par Maxime Ruiz, auteur de quelques photos des coulisses d’Irréversible et qu’on retrouve à l’écran dans Lux Æterna (dans le rôle du directeur de photo).
Pulpe Amère ne sera pas sur le Blu-Ray car, en revoyant ce très court film, on s’est tous dit qu’il n’avait pas vraiment sa place dans l’édition vidéo. Et oui, j’avais tourné ce court avec mon ami Maxime Ruiz, dans son studio photo de l’époque. Depuis il avait été photographe de plateau sur Irréversible, et il est fabuleux comme acteur dans mon dernier moyen-métrage Lux Æterna.
Il y a quelques mois, Albert Dupontel nous racontait une anecdote à propos de la carrière internationale d’Irréversible : aux États-Unis, il n’avait pas sa carte d’identité et pour pouvoir payer avec sa carte de crédit, il a présenté un DVD du film… Quel impact le film a-t-il eu sur votre carrière ?
Moi aussi, quand je me fais arrêter par des flics et que je dois leur dire mon nom et profession, quand j’en viens à citer Irréversible, ils l’ont absolument tous vu. Pareil pour les chauffeurs de taxi et videurs de boîte. Ça aide beaucoup.
Vous aviez tourné des images de Monica Bellucci sur son lit d’hôpital. On aurait pu s’attendre à ce que l’Inversion Intégrale, plus focalisée sur le personnage d’Alex qui ouvre le film, se conclut sur ces images, ou soit en tout cas l’occasion d’utiliser des rushes inédits, ce n’est finalement pas le cas. Avez-vous songé à utiliser des séquences jamais montrées ?
J’ai pensé effectivement à inclure cette séquence coupée mais elle serait arrivée à la toute fin du film comme un happy end, dévoilant qu’elle était toujours vivante. J’ai pensé que c’était plus fort et anxiogène de ne pas savoir ce qu’il lui était arrivé, et j’ai abandonné l’idée.
Climax et Lux Æterna n’ont pas provoqué de scandale (on se souviendra tout de même des pompiers à la fin de la séance cannoise de Lux Æterna), certains critiques pensent même que vous vous êtes assagi. Cette ressortie, c’est aussi pour rappeler que vous n’avez rien perdu en attendant votre fameux projet censé être plus sombre et plus brutal ?
Assagi ou pas n’est pas le sujet. On fait des films autour de sujets qui sont plus ou moins problématiques dans leur représentation. Il ne faut jamais se forcer pour choquer, tout comme il ne faut pas avoir peur de le faire. Moi, il n’y a que les infos du journal qui arrivent encore à me choquer. Pas les films narratifs avec des acteurs.
Irréversible marque un tournant majeur de votre carrière : le premier long avec mouvements complexes et coupes invisibles, vos premières collaborations avec Laurent Lufroy et Benoit Debie. Comment voyez-vous votre carrière et votre style évoluer dans les 10 ans à venir ?
Je continuerai à faire des films avec mes amis surdoués, j’espère. C’est l’émulation collective qui nous donne envie de tourner ces films puis de les exploiter.
Un immense merci à Gaspar Noé pour sa disponibilité.
Entretien conduit par mail, par Frédéric Polizine et Alexis Veille, en août 2020.
Here it is. After more than forty interviews, the coverage of each movies since 2003, important updates on the website, we had to go back to our roots — as Irreversible gave birth to us — to finally offer you an interview with Gaspar Noé. We deeply thank Gaspar Noé for his availability and Isabelle Sauvanon, without whom we couldn't have made this. Happy reading!
If you could reshoot one sequence from one of your movie, which one would it be?
I don't really have any regrets on a specific sequence. Maybe because I never watch my old movies because I always want to re-edit, re-grade, remix it...
After Philippe Nahon's loss, which deeply moved us, do you consider to make him a tribute cinematically?
I've written a tribute letter [FR] to my friend when he died, which was published in Libération... Since then, his ashes were thrown in sea and it makes me want to swim there. The next tribute will be when the 2K/4K digital master of the two movies we made together will be done and that the movie could finally be re-released in theaters and on Blu-Ray.
You shoot more regularly. Is it because you have more opportunities or simply beacause you are more conscious of passage of time?
I shoot when I'm given the money to shoot. Enter the Void and Love were very difficult to finance, especially the first one which was really expensive (€12M) and with a very atypical style. But I didn't want to scatter by directing projects that mattered less to me. Today, now these teenagers dreams are accomplished, I'm more willling to seek where the money is to do a movie I can enjoy myself directing and on which I won't bother too much about. If it has to be shot within 15 days, I'm sold! Give the money. And if it has to be done within 5 days, it's all the same... And if I'm given money for shooting a movie during 4 months or more, like Enter the Void, of course I'm in. But the freedom given is always more precious than the budget.
Which recent work - film, book, music... - affected and inspired you, and even opened up new horizons?
Technically speaking, the thirty first minutes from Gravity astonished me. 6 months ago, I was in hospital stuffed with morphine, and the movie was broadcasted dubbed in French on the little TV at the other end of my room. And I loved it as much as when I watched it the first time in the best 3D theaters in Paris... Except that, I took advantage of my recovery and particularly quarantine to watch many great movies I had never seen before : Andrei Rublev, The Rules of the Game, The Ballad of Narayama (the one from 1958 directed by Kinoshita), Sansho the Bailiff and The Life of Oharu. Discovering such masterpieces makes you want to direct new movies...
Do you consider, some day, to adapt a book or work with a scriptwriter?
Yes, for sure. But I don't have any precise novel to adapt or co-scriptwriter at the moment.
How do you calm down your anxiety?
Watching classics movies and falling asleep.
In your career, most of your projects came from past ideas: Pulpe Amère presaged Carne with its ever-present voice over, and at the time of Carne, you already had Enter the Void in mind as much as Love, which was nearly produced by Dario Argento. Love project in 1992 was known as Danger and it's the plot you offered to Vincent Cassel and Monica Bellucci before you choosed to make a rape-and-revenge movie with long shots... If you recognized being inspired by Memento, when did you consider to make the movie in a non-chronological order?
Dario Argento never nearly produced Irreversible! I don't know where this fake news comes from.
[Ed.: The information according to which Dario Argento should have produced Love - not Irreversible comes from an interview Gaspar Noé gave to Christophe Lemaire who asked him, just after Carne what were his projects : "Otherwise, I also have a project with Dario Argento. Having watched Carne in Toronto, he offered me to produce my next movie. A psycho-social sexual drama! The story of a love relationship between two lost souls that ends badly."]
However, he did came in my editing room when I was editing the movie, I showed him the very first part and I stopped when Monica's character enters the tunnel. I wanted him to watch the whole movie on the big sceen... Except that, when I saw Memento, I felt lost in its maze-like temporal structure, made of sequences going backwards and others in the other way around. But watching this film reminded me another film I had missed in theaters and on TV, but which was told backwards. It was Betrayal, based upon a play by Harold Pinter. So, I wrote a "rape-and-revenge" (missed revenge in this case) story, happening in one night with 12 sequences we could edit backwards. I wrote each sequence on a separate page, and reversing the order once then twice, I could see if the movie would be clearly understandable - and if it was logical - in both orders. We shot chronologically in a bit less than 6 weeks, but I knew at the very beginning that the movie would be edited backwards. It was my wish. 17 years later, when we remastered it in 2K/4K, when I had the movie back in my editing room, I thought I should try an alternative cut for the Blu-Ray extra features. This new chronological cut, quite quickly made, was actually way more interesting than I had ever imagined. It was screened in Venice and it is finally releasing in theaters too. But I deeply advise everyone to watch the 2002 cut first, then watch the "straight cut" from 2020. The first one asks a lot of questions, the second brings some not so gleaming answers.
During your masterclass in Lyon, Cyril Roy [actor in Enter the Void] told me that in Asia, Irreversible was recut in its chronological order for DVDs extra features. You then explained me that it was made without your agreement and instead, you probably would have added black title cards between each scenes, a bit like Love. It's not what we see in the straight cut, for which you and your crew remade each transitions in order to keep invisible cuts. Why?
Indeed, in Korea they tried a recut for their bonus features, but when I started to watch it, the cuts were so poorly done that I stopped after 20 minutes and I never watched it again. In the straight cut that I edited, we made sure that every spliced between sequences remained as much enjoyable as in the original version.
Back in 2016, StudioCanal was supposed to re-release the movie in Germany with a new master. In the end, it was on an Italian Blu-Ray that we discovered this master in 2017. is there any difference between the 2017 and the 2020 masters?
I think that Irreversible Blu-Rays already available (italian, japanese etc.) are all frauds in fake high definition, made from poor masters used for TV and DVDs in 2002... No, I absolutely changed nothing to the original cut by doing, in 2019, the new master of the movie.
[Ed. : if there are some well and truly fake Blu-Rays made from the DVD master, the italian edition is well a "new master", watchable in France through Prime Video. The film grain being more detailed as much as the overall images, than the DVD or the fake Australian Blu-ray. We've been confirmed by StudioCanal that the version available on Prime Video is legit. There is a mystery on this master that Gaspar Noé seems to never approved of. We'll make sure to have more informations from different distributors and editors to know more about this]
Is the period between this 2017 master and the re-release due to the fact that you wanted to do the Straight Cut for the Blu-Ray extra features? Otherwise, why has there been such amount of time while the master seemed ready and most likely approved?
The only master we approved was the one we started in 2019 which is finally ready to be commercialised in 2020. No other were ever approved. And it's nice to go from "2002" to "2020", it's like a partial reversal of reading direction, just as in the new cut.
Irréversible was remastered in 4K, but StudioCanal will edit both versions in one double discs "standard" blu-ray combo pack. Is it only because of the lack of popularity from the UHD format?
The truth is that the film was originally shot in Super 16mm, post-produced in HD video but not at all 4K, and after the grading reshot on 35mm film. We saw the 16mm grain and it was part of the charm of the picture. If the film is upscaled in 4K, the original image is in a lower definition than 2K anyway. To release 4K Blu-rays, they have to be made from 4K masters or 35mm or 70mm films. Otherwise, it's pointless. But if theaters projectors are 4K, it's normal to deliver a 4K DCP, even if the original film hasn't the right definition.
It's not a coincidence if I talked about Pulpe Amère earlier: the first DVD of Irreversible should have included it in its extra features. Yet, if it's mentioned on the DVD cover, your shortfilm is completely absent. Can we expect to see it in its entirety, maybe in the blu-ray features? For our readers, let's remind that this shortfilm's cinematography was made by Maxime Ruiz, still photographer on Irreversible we can discover on screen in Lux Æterna (as the cinematographer).
Pulpe Amère won't be part of the Blu-Ray because, rewatching this very short film, we all thought it didn't belong in the video edition. And yes, I had shot this short with my friend Maxime Ruiz, in his photo studio at the time. Since then, he has been a still photographer on Irréversible and he is fabulous in my last middle-length film Lux Æterna.
[Ed. in France, a movie is considered "short" below 59 minutes and above is considered a feature film. Sometimes, depending on people, films between 30-59 minutes are called "moyen-métrage", or "middle-lenght film"]
A few months ago, Albert Dupontel told us a story about Irreversible success : in the US, he didn't have an ID and in order to buy something with his credit card, he had to show a DVD from the movie... Which impact the movie had on your career?
Me too, when I'm arrested by cops and I have to tell them my name and job, when I have to tell I made Irréversible, all of them saw it. Same for the taxi drivers and bouncers. It helps a lot.
You shot unused footages of Monica Bellucci on her hospital bed. We could have expected that the Straight Cut, more focused on Alex who opens the movie, ends up with these footages, or at least shows some never-before-seen footages. It's not the case. Did you consider using unused footages?
I indeed considered using this cut scene but it would have been used at the very end as an happy end, revealing that she was still alive. I thought it was stronger and more anxious not telling what happened and I gave up the idea.
Climax and Lux Æterna didn't provoke any outrage (well, we remember the emergencies coming at the end of Lux Æterna's Cannes screening), some film critics even think you're wiser. Is this re-release a way to remind you haven't lost anything, before your project supposed to be darker and more vicious?
Wiser or not isn't the subject. We shoot films about more or less problematic themes. We should never force ourselves to shock people just as we should not be afraid of doing so. Personnally, only the news are still able to shock me. Not fiction movies with actors.
Irréversible is a turning point in your career : your first feature with complex camera movements and invisible cuts, your first collaboration with poster designer Laurent Lufroy and cinematographer Benoit Debie. How do you expect your career and style evolve in the upcoming 10 years?
I hope I'll continue shooting films with my gifted friends. It's the collective competition which makes us want to shoot these movies and to show them.
A huge thanks to Gaspar Noé for his availability.
Interview made by mail by Frédéric Polizine and Alexis Veille, august 2020.
Gaspar Noé
Réalisateur
Director
POLIZINE, Frédéric; VEILLE, Alexis. Entretien exceptionnel - Gaspar Noé. Le Temps Détruit Tout. [en ligne] Publié le 24 août 2020. Consultable à l'adresse : http://www.letempsdetruittout.net/interviews/gaspar-no%C3%A9