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Stéphanie Sec interprète l'infirmière de l'hôpital dans Seul contre tous.

"Avec Gaspar ça secoue, c'est créatif."


Pourriez-vous vous présenter ?


Première fois sur les planches à 8 ans pour un spectacle de mime en MJC et après je n'ai plus arrêté.
A l'époque en 1992, ouvreuse au Max Linder, je croisais Jim Jarmusch, Alain Corneau, Brialy, Binoche et Carax, Wenders et bien d'autres dans la pénombre des sas du cinéma MAX LINDER ou au comptoir du bar tard le soir. Il y avait aussi de jeunes réalisateurs comme Jeunet et Caro qui y projetaient leurs court-métrages et un jour ce fut Gaspar que je croisais. Le Max LINDER était plein de gourmandises pour ce cinéma que j'aime tant !


Quand et comment a commencé votre aventure sur Seul contre tous ?


Elle a commencé par la rencontre avec Gaspar. La première fois il me semble que c'était au Max LINDER, une collègue le connaissait et nous a présenté. Puis nous nous sommes retrouvé à la fête de fin de tournage du premier long métrage de Cédric Klapish "Rien du tout" auquel j'avais participé. Nous avons bu un verre, enfin ...plusieurs... et avons conclu qu'il fallait qu'on bosse ensemble.


Connaissiez-vous le cinéma de Gaspar Noé et comment s'est déroulé le tournage de vos scènes ?


Je ne connaissez pas du tout le travail de Gaspar. J'ai donc rencontré Lucille et Gaspar chez eux, je pense qu'ils ont voulu me préparer au choc de son cinéma car on se connaissait peu. J'ai pu découvrir plusieurs courts métrages de Gaspar cet après-midi là. Je sentais le regard amusé de Gaspar. Ils m'ont montré aussi le cinéma qu'ils aimaient dont un film qui m'a beaucoup marqué "Inauguration of the Pleasure Dome" de Kenneth ANGER, du psychédélique complètement débridé réalisé en 1954! cinéma expérimental et moderne.
Bref au bout du compte je savais que je ne ferai pas deux rencontres comme ça dans ma vie. Je tournais qq courts à l'époque et franchement je m'ennuyais. Je trouvais les réal nombrilistes et pensais qu'ils n'avaient pas grand chose à raconter (pas tous heureusement...).
La rencontre avec Gaspar fut donc un secouage de tripes !
Je me sentais maladroite sur le tournage mais bon... Je courais en rond dans un grand entrepôt pour arriver essoufflée sur la scène. Gaspar était drôle et cynique parfois comme son regard sur la vie, mais pas envers les acteurs ; il m'a semblé généreux et patient, à l'écoute de ce qui se passait sous ses yeux, créatif en sachant choper le moindre détail qui pourrait l'amuser. Il arrive à rire de situations très glauques, il tourne autour, curieux et insatiable. Enfin ce que j'en dis me regarde, je me plante peut-être. Il y avait la douceur et l'écoute de Lucille toujours à proximité. Philippe partage beaucoup, rempli d'humanité, qui regarde les autres sans passer à côté.


Quel était votre travail avec Philippe Nahon, dont le personnage du Boucher vous serre dans ses bras à la fin de la séquence, comme il le fera avec sa fille à la fin du film ?


En fait on a partager un des rares moments de tendresse du film. Le boucher fait une pause dans sa misère affective le temps d'un câlin avec une infirmière qu'il trouve pas mal et qui ne le relie en rien à sa vie, ne le juge pas et a besoin de lui à ce moment là. Son seul repère affectif c'est sa fille... alors dur dur... Bosser avec Philippe fut une belle rencontre, un type bien, vraiment.


Vous souvenez-vous d'où elles ont été tournées ?


Le passage ou Philippe prend  l'infirmière dans ses bras a été tourné dans un hospice au Pré Saint Gervais. Je me rappellerai cette journée toute ma vie. De vrais résidents étaient là quand on tournait les scènes et Gaspar nous a posté devant une porte ouverte où une très vieille femme soulevait sa jupe et me montrait son sexe en marmonnant entre amusement et souffrance ; Gaspar pouvait sourire de ça à défaut d'en pleurer. J'y ai croisé aussi le seul homme de la résidence, il était magnifique et mesurait presque 2 mètres, sa femme le visitait ce jour là, elle ne pouvait plus s'occuper de lui. Vous voyez les circonstances dans lesquelles Gaspar nous a placé pour tourner ne sont pas anodines !
Le passage où je viens le chercher dans sa cage de gardien a été tourné dans les anciens entrepôts des NMPP porte de la Chapelle à Paris.


Au final, qu'avez-vous pensé de Seul contre tous quand vous l'avez découvert et qu'a représenté ce tournage pour vous ?


Je me suis dit que je ne m'étais pas trompée, enfin un type qui va au bout de ce qu'il montre sans en adoucir l'acidité. La merde c'est de la merde et pas autre chose. Y'a pas de compromis.
Ce personnage n'est pas touchant mais je n'arrive pas à lui en vouloir,sa misère affective est telle que je ne vois pas comment il pourrait être meilleur.
Avec Gaspar ça secoue, c'est créatif.
Ma participation fut brève mais je suis fière d'y avoir participé, je me sentais chez moi.
Dans un documentaire, on a rarement l'intime des gens, y'a trop de recul, avec Gaspar on y rentre complètement et c'est parfois dur car la vie est comme ça, y'a pas à tortiller. L'homme est de travers.
Quelqu'un de ma famille très proche a été violée par 4 types dans une cave de cité de Belleville : c'est une saloperie de la vie ça ! Elle a croisé le chemin des barbares cette nuit là et ce qu'elle a perdu je trouve que Gaspar le montre "magnifiquement" dans "Irréversible" à travers le viol du personnage de Bellucci et surtout par la chronologie du film qui nous rappelle ce qu'elle a perdu : la sérénité, l'espoir, l'amour d'un enfant à venir, la sagesse de son homme, on pourrait dire le bonheur ? quand on voit un film où quelqu'un se fait agresser, on passe à autre chose dans la suite du film et on oublie le trauma, ça ne nous fait rien, vous trouvez ça normal ? Ce genre de scène insupportable nous ré-humanise, c'est tout sauf de la violence gratuite, je ne comprends pas que les gens soient aussi obtus ! Chochottes...


Un grand merci @ Stéphanie Sec

Stéphanie Sec plays the hospital nurse in Seul contre tous.

"With Gaspar it shakes, it's creative."



Could you introduce yourself?


First time on the boards at 8 years old for a mime show in MJC and after that I never stopped.

At the time in 1992, opener at Max Linder, I met Jim Jarmusch, Alain Corneau, Brialy, Binoche and Carax, Wenders and many others in the dim light of the MAX LINDER cinema airlocks or at the bar counter late at night. There were also young directors like Jeunet and Caro who screened their short films there and one day it was Gaspar that I met. The Max LINDER was full of delicacies for this cinema that I love so much!


When and how did your adventure on I Stand Alone begin?


She started with the meeting with Gaspar. The first time it seems to me that it was at Max LINDER, a colleague knew him and introduced us. Then we met at the end of shooting party for Cédric Klapish's first feature film "Rien du tout" in which I had participated. We had a drink, well ... several ... and concluded that we had to work together.


Did you know Gaspar Noé's cinema and how was the shooting of your scenes?


I don't know Gaspar's work at all. So I met Lucille and Gaspar at home, I think they wanted to prepare me for the shock of his cinema because we didn't know each other well. I was able to discover several short films by Gaspar that afternoon. I could feel Gaspar's amused gaze. They also showed me the cinema they liked, including a film that marked me a lot "Inauguration of the Pleasure Dome" by Kenneth ANGER, completely unbridled psychedelic produced in 1954! experimental and modern cinema.

Anyway, at the end of the day, I knew I wouldn't have two encounters like that in my life. I was shooting qq short at the time and frankly I was bored. I found the real navelists and thought that they did not have much to say (not all fortunately ...).

The meeting with Gaspar was therefore a shaking of guts!

I felt awkward on the set but hey ... I was running in circles in a large warehouse to arrive breathless on the stage. Gaspar was funny and cynical at times like his outlook on life, but not towards the actors; he seemed generous and patient to me, listening to what was happening in front of his eyes, creative knowing how to nab the smallest detail that could amuse him. He happens to laugh at very gloomy situations, he turns around, curious and insatiable. Finally what I say concerns me, I may be screwing up. There was the sweetness and listening of Lucille always nearby. Philippe shares a lot, full of humanity, who looks at others without missing out.


What was your work with Philippe Nahon, whose character The Butcher hugs you at the end of the sequence, as he will with his daughter at the end of the film?


In fact, we shared one of the film's rare tender moments. The butcher takes a break from his emotional misery for the time of a hug with a nurse whom he finds good and who does not connect him in any way to his life, does not judge him and needs him at that moment. His only emotional landmark is his daughter ... so hard, hard ... Working with Philippe was a great meeting, a good guy, really.


Do you remember where they were shot from?


The passage where Philippe takes the nurse in his arms was shot in a hospice at Pré Saint Gervais. I will remember this day all my life. Real residents were there when we were shooting the scenes and Gaspar posted us in front of an open door where a very old woman lifted her skirt and showed me her penis, muttering between amusement and pain; Gaspar could smile about it if not cry. I also met the only man in the residence there, he was magnificent and measured almost 2 meters, his wife was visiting him that day, she could no longer take care of him. You see the circumstances in which Gaspar placed us to shoot are not trivial!

The passage where I come to look for him in his guardian cage was shot in the old warehouses of the NMPP Porte de la Chapelle in Paris.


In the end, what did you think of I Stand Alone when you discovered it and what did this shoot mean to you?


I told myself that I was not mistaken, well a type who goes to the end of what he shows without softening the acidity. Shit is shit and nothing else. There is no compromise.

This character is not touching but I can not blame him, his emotional misery is such that I do not see how he could be better.

With Gaspar it shakes, it's creative.

My participation was brief but I am proud to have participated, I felt at home.

In a documentary, we rarely have the intimacy of people, there is too much distance, with Gaspar we enter it completely and it is sometimes hard because life is like that, there is no need to squirm. The man is askew.

Someone from my very close family was raped by 4 guys in a cellar in a Belleville city: that's a bitch in life! She crossed the path of the barbarians that night and what she lost I find that Gaspar shows it "magnificently" in "Irreversible" through the rape of the character of Bellucci and especially by the chronology of the film which reminds us of what 'she lost: serenity, hope, the love of an unborn child, the wisdom of her man, one could say happiness? when we see a film where someone is assaulted, we move on in the rest of the film and we forget the trauma, it doesn't bother us, do you find that normal? This kind of unbearable scene re-humanizes us, it's anything but gratuitous violence, I don't understand why people are so obtuse! Chochottes ...


A big thank you @ Stéphanie Sec

Stéphanie Sec

Actrice

Actress

LTDT. Entretien avec Stéphanie Sec. Le Temps Détruit Tout [en ligne]. Publié le 3 novembre 2008. Consultable à l'adresse : http://www.letempsdetruittout.net/interviews/st%C3%A9phanie-sec

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